La trilogie Fifty Shades of Grey n’en finit pas d’émoustiller les lectrices des deux côtés de l’Atlantique. Mais pourquoi tant d’amour ? Si les femmes sont aussi friandes de romans érotiques, c‘est qu’ils semblent taillés sur mesure pour le désir féminin.
La littérature, un moyen noble de se faire du bien
Avec la trilogie érotique Fifty Shades of Grey, ce qu’on a appelé aux USA le « mummy porn » ou le « porno pour les mères de famille » (autrement dit, très soft) connaît dans l’Hexagone un joli succès. Il faut dire que la littérature érotique dispose de plus d’un argument en sa faveur pour faire mouche auprès des femmes et titiller leurs sens.
Depuis très longtemps, les hommes sont habitués à stimuler leur désir par des revues ou des films pornos. Chez les femmes, cette pratique est beaucoup moins répandue et surtout moins admise. « Même si notre société occidentale affiche des idées progressistes, il perdure chez les femmes un important fond de culpabilité pour tout ce qui touche à la sexualité. Chercher à nourrir leurs fantasmes les fait presque systématiquement se sentir coupables » explique Ghislaine Paris, sexologue.
Alors si on leur propose un moyen « noble » les dédouanant de cette culpabilité tenace, elles sont preneuses ! « Le livre érotique a l’immense avantage, aux yeux des femmes, de s’adresser à l’intellect plus qu’au corps et aux sens. Beaucoup de femmes ont en effet tendance à penser que leurs émotions sexuelles sont purement cérébrales et à en nier la dimension physique » avance la spécialiste. L’héroïne de Fifty Shades of Grey en est l’exemple type : étudiante en littérature au profil de parfaite intello !
Les femmes plus sensibles aux mots
On ne peut qu’en faire le constat, sans savoir vraiment l’expliquer : les femmes sont peu excitées par les stimuli visuels, elles le sont en revanche très souvent par les mots. « Ce n’est pas pour rien que les séducteurs désireux d’arriver à leurs fins se transforment en beaux parleurs ! Pas pour rien non plus que l’amour courtois faisait la part belle au verbe. De tout temps, pour être sexuellement réceptives, les femmes ont eu besoin qu’on leur parle à l’oreille, qu’on leur raconte des histoires » note Ghislaine Paris.
Autre atout de la littérature érotique : elle est respectueuse de l’imaginaire féminin, souvent très fertile. « Le livre n’impose aucune image, il offre un support sur lequel la lectrice peut tout imaginer, tout projeter, dans une liberté totale. Elle peut tout s’autoriser en pensées et le refouler immédiatement après : pas de traces, donc pas de culpabilité » insiste-t-elle. Quand l’héroïne de Fifty Shades of Grey consent à se soumettre aux fantasmes sadomasochistes de son partenaire, la lectrice peut se projeter elle-même dans ces scènes. Imaginer quelles seraient ses émotions à elle, ses mots, son plaisir… et puis tourner la page, comme si de rien n’était.
Un puissant aphrodisiaque
On a tendance à considérer la littérature érotique comme un gadget assez soft, ne produisant finalement que peu d’effets. Erreur. « Avec cette littérature, on est au cœur du désir et du plaisir féminins. Une femme peut parfaitement avoir un orgasme du simple fait de lire un tel livre, sans même stimuler physiquement sa zone génitale » affirme Ghislaine Paris. Vraiment ? La spécialiste en veut pour preuve les orgasmes que tout un chacun connaît pendant le sommeil, provoqués par des rêves sexuels. « La littérature peut dégager cette même puissance que le rêve » insiste-t-elle.
Certaines femmes ne recherchent pas forcément un effet aussi immédiat et tangible à travers les livres érotiques. « Elles les utilisent pour se mettre « en condition ». Particulièrement si leur partenaire ne prend pas assez le temps » décrit-elle. Malgré son côté sombre, le héros de Fifty Shades of Grey est un amant fort doué, chevaleresque et attentionné : de quoi motiver les lectrices et leur faire oublier une réalité parfois un peu plus terne !
Par des femmes, pour des femmes
Cette littérature a d’autant plus de chance de toucher les femmes qu’elle est écrite par une femme. C’est le cas avec Fifty Shades of Grey. « Il n’est pas question de faire preuve de sexisme, mais simplement de constater que les fantasmes féminins n’ont en général rien à voir avec les fantasmes masculins.
Et que pour bien les décrire, mieux vaut les avoir vécus et ressentis » remarque Ghislaine Paris.
Beaucoup de fantasmes de femmes tournent autour de la soumission et du viol, même si bien évidemment elles n’ont aucune envie d’être violées ni maltraitées dans la réalité. « Ces fantasmes de masochisme ont probablement une origine culturelle. Ils sont cohérents avec l’interdit très fort pesant depuis toujours sur la sexualité féminine : le fait d’être forcées déresponsabilise les femmes. Elles ne sont pour rien dans ce qui leur arrive ! » explique la sexologue. « Lire de la littérature érotique écrite par une femme, pour les femmes, c’est prendre sa sexualité en main et cesser d’être totalement dépendante du désir des hommes » conclut-elle.
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